Bella n’est pas contrôlée par qui que ce soit. C’est le genre de film qui pousse à l’humilité lorsqu’on essaye d’en parler. Le film est une adaptation de Pauvres Créatures, un roman d’Alasdair Gray, un écrivain écossais décédé en 2019 à l’âge de 85 ans. Le livre a été écrit en 2003 et son univers combine un féminisme moderne avec un monde onirique proche du steampunk. Le film suscite l’envie d’en apprendre davantage sur l’auteur, son œuvre, et comment le réalisateur Yórgos Lánthimos a adapté le scénario. On se demande si l’intensité visuelle et les dialogues percutants du film sont également présents dans le livre.
Pauvres Créatures est un film fort et parfaitement ancré dans son époque. Il raconte l’histoire de Bella, une jeune femme ramenée à la vie par le brillant et peu conventionnel Dr Godwin Baxter. Sous sa protection, Bella désire s’instruire et refuse de se plier aux préjugés de son époque en ce qui concerne l’égalité et la libération. Le film revisite le conte de Frankenstein et présente des éléments rappelant Pinocchio, mais avec un fort contenu sexuel et gore chirurgical.
Les situations auxquelles Bella est confrontée dans le film abordent diverses thématiques telles que les convenances sociales, les philosophies de vie, la politique libérale et le socialisme. Bien que parfois sa construction évolue lentement, le monde dans lequel elle évolue reflète sa vision et son humeur, avec des décors fantastiques et époustouflants. L’actrice Emma Stone offre une prestation captivante qui ne laisse pas indifférent.
Dans chaque étape du récit, des hommes tentent en vain de s’approprier et de contrôler Bella, utilisant des méthodes variées, allant des normes sociales patriarcales à la violence, en passant par l’intimidation, l’argent et la manipulation. Cependant, même la gentillesse, la rationalité et l’ouverture d’esprit de certains “alliés” peuvent être vues comme des formes de manipulation. Malgré cela, le film propose une lueur d’espoir quant à la possibilité de rédemption masculine et de compréhension mutuelle.
L’intrigue pousse le spectateur à se questionner sur la façon dont il réagirait face à chaque situation, en particulier en tant qu’homme. Ainsi, même inconsciemment, on rejoint la cohorte de ces “pauvres créatures” tentant de contrôler, de comprendre et de maîtriser la vie d’une héroïne bien supérieure. Le film souligne la possibilité d’être de meilleurs alliés.